Résumé

Le Crénom, Baudelaire ! de Jean Teulé se présente comme un « roman », comme une fiction prenant appui sur la vie de Baudelaire, telle que ses biographes l’ont racontée. À première vue, le narrateur veille à confondre sa voix avec celle de Baudelaire, voire à la subordonner à celle du poète, en usant d’une mosaïque de citations, et à user de documents divers ou de photographies afin de garantir l’ancrage de sa fiction dans une sorte de vérité biographique. Mais en définitive c’est l’imagination dépréciative du narrateur qui prévaut sur sa documentation, et qui s’emploie à placer Baudelaire dans de nombreuses situations peu flatteuses, ce qui débouche, de fait, sur un réquisitoire quasi systématique. La voix du narrateur prévaut aussi par une forme d’appropriation ou d’annexion négative : les citations de Baudelaire sont fréquemment recyclées hors de leur contexte, privées de leur qualité poétique à mesure qu’elles sont intégrées aux propos volontiers prosaïques ou vulgaires du narrateur, et ainsi dotées d’un statut ancillaire. Dans ce roman inutile, soumettre la vie de Baudelaire à une insistante et triviale incrimination signifie aussi dégrader les écrits du poète.

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